Imaginez un instant la Suisse de demain

Et si dans quelques années, le son qu’on entend dans les villes, ça n’était plus celui des voitures mais celui des oiseaux ? Et si l’air qu’on respire ici était aussi pur que celui de nos montagnes ? La crise climatique, c’est aussi l’occasion de transformer notre société de manière positive et de la rendre plus agréable et plus juste pour toutes et tous. On vous invite à un voyage dans le futur, un futur possible si on travaille main dans la main ensemble, et main dans la main avec la nature.

On est en Suisse, en plein été 2035.

C’est samedi matin, et Nessa se réveille dans son appartement estudiantin au cœur de la ville. Elle ouvre les yeux sur une vue magnifique de toits végétalisés et de jardins suspendus, remplis de fleurs et d’arbustes. Elle est entourée de verdure, de couleur et d’harmonie. La ville n’est plus ce paysage de béton, de verre et d’acier, mais c’est un endroit où la nature prospère en parfaite harmonie avec l’urbanisation.

En Suisse les températures ont augmenté de 3 degrés comparé de l’ère préindustrielle, deux fois plus que la moyenne mondiale. Et cette année, la canicule ne fait pas exception. Mais Nessa sait que ça sera supportable. Parce que grâce aux changements majeurs apportés à la ville, la nature a fait un retour remarquable et apporte sa fraicheur relative. Les arbres ne sont plus taillés à outrance. La végétation luxuriante couvre désormais les bâtiments, avec des toitures végétalisées et des jardins sur les toits. Des panneaux solaires et des micro-éoliennes ont été installés sur de nombreux toits verts qui captent l’énergie naturelle et l’injectent dans les micro-réseaux des villes. La végétation des toits fournit une isolation thermique et elle ralentit le ruissellement de l’eau en cas de fortes pluies. Ça a permis de diminuer la température en ville et d’améliorer la biodiversité. Les arbres, les plantes grimpantes sur les bâtiments, les fleurs, oiseaux, insectes et les pollinisateurs sauvages en sont la preuve.

Nessa sort de son appartement, et enfourche son vélo électrique. Les villes ont été réaménagées pour favoriser la mobilité des piétons et des cyclistes, et la circulation automobile a été réduite au minimum. Les véhicules qui restent sont électriques et silencieux, et ne produisent pas de pollution atmosphérique. Ces véhicules sont d’ailleurs connectés au réseau, ils stockent l’énergie pendant la journée et la redistribue aux foyers pendant la nuit. Nessa pédale tranquillement sur une des quatre voies de pistes cyclables qui ont remplacé les voies de circulation automobile, à l’ombre des arbres qui séparent en toute sécurité les vélos des bus, trams et des quelques voitures restantes.

Nessa s’arrête dans un marché local pour faire ses courses. Dans plein de quartiers et dans la majorité des villages, des places de marché arborisées et semi-ouvertes ont été aménagées. Les coopératives et réseaux d’agriculteurs et d’agricultrices ont fleuri, ce qui leur a permis de s’organiser pour faire plus de vente directe, et d’augmenter leurs revenus qui sont à présent le reflet réel de leur travail crucial pour nourrir la population.

Après être allée au marché, Nessa charge son vélo, et traverse la ville en direction de la campagne où vivent ses grands-parents à qui elle va déposer quelques courses. Les pistes cyclables ont reconnecté les villes aux campagnes, et passent à travers les champs verdoyants qui témoignent de la petite révolution que l’agriculture suisse a subi.

Nessa a grandi en voyant des champs desséchés en été, mais grâce à la plantation de buissons et de haies de biodiversité, les anciens champs jaunes et bruns se sont transformés en un paysage coloré et vivant, où les cultures annuelles poussent efficacement entre des rangées d’arbres qui absorbent la chaleur et les émissions.

Les pratiques agricoles protectrices et régénératrices de l’agriculture de conservation sont à présent largement utilisées. Elles minimisent la perturbation des sols et protège les terres grâce à la diversification des cultures, si bien qu’on ne voit plus de champs retournés et nus. Les sols sont traités comme la merveille vivante qu’ils sont. Ça a permis aux aliments de retrouver leur richesse nutritionnelle tout en capturant naturellement une quantité importante de gaz à effet de serre.

Nessa passe le long d’une sylvopasture, qui mélangent vaches, arbres et buissons. Puis elle longe des cultures intercalaires, rangées de maïs ou de blé, entrecoupées de rangées de plantes complémentaires, comme les haricots ou des légumes verts qui aident entre autres à améliorer la qualité du sol. Tous ces changements portés par le monde agricole ont renforcé la résistance des écosystèmes aux conditions climatiques extrêmes, ils ont augmenté la fiabilité de la production alimentaire locale, et ont permis à la biodiversité de se régénérer.

En arrivant devant la maison familiale, Nessa aperçoit sa grand-mère à travers la fenêtre en verre solaire. A l’intérieur, il fait étonnamment frais. Nessa se souvient des gros travaux de rénovation d’il y a dix ans. Pendant la canicule de 2024, après deux semaines à plus de 30 degrés, ses deux grands-parents avaient fini à l’hôpital suite à un coup de chaleur. L’hiver d’après ils s’étaient décidé à profiter des aides étatiques mises à disposition des ménages suisses pour encourager la rénovation massive de tous les bâtiments. Les travaux d’isolation avaient amélioré la conservation de la chaleur en hiver et le maintien de la fraîcheur en été, ce qui avait réduit la consommation d’énergie, et grandement amélioré la qualité de vie.

La Suisse s’était donné une décennie pour couper ses émissions de moitié et augmenter sa résilience. Pendant cette période, en plus des rénovations massives et des ajouts d’énergie renouvelables sur chaque surface utilisable, les nouvelles maisons avaient aussi commencé à intégrer des réservoirs souterrains pour récupérer l’eau de pluie et ajouter une source d’eau alternative en cas de périodes de sécheresse prolongées.

Après avoir passé la journée à la campagne, Nessa retourne en ville pour retrouver ses copines au bord du lac. Elle passe chercher son plat préféré à l’emporter. Il est livré dans un récipient réutilisable, qu’elle pourra déposer dans un des points de collecte après avoir fini sa soirée. Les cartes des restaurants proposent désormais au minimum 50 % de plats à base de plantes. La viande est toujours disponible, mais c’est un repas spécial surtout cuisiné par les aînés plutôt qu’un choix quotidien. La végétalisation de la nourriture a contribué à la diminution spectaculaire des taux de maladies cardiaques, de diabète et de plusieurs types de cancers, et grâce à ça les coûts de la santé publique ont aussi considérablement diminué.

La Suisse a également fait des gros progrès dans la réduction du gaspillage alimentaire. Les municipalités ont mis en place des programmes de collecte des déchets organiques, ce qui permet de composter tout ce qui n’est pas consommé et de nourrir ainsi la terre.

Nessa va fêter ses 19 ans dans quelques mois. Elle avait 6 ans et demi le 22 avril 2023, quand elle avait marché dans Bern avec La Marche Bleue, qui demandait à la Suisse de respecter les accords de Paris.

Ce texte a été partagé à l’issue de la Marche Bleue le 22 avril 2023 sur la place fédérale à Berne, avec les 4000 participant.e.s venu.e.s accueillir les marcheuses et marcheurs à l’issu du périple commencé le 1er avril 2023 à Genève. Toute l’équipe de Swiss Climate Action félicite et remercie les 4 initiatrices de la Marche Bleue Valérie D’Acremont, médecin infectiologue, Julia Steinberger, économiste écologique, Irène Wettstein, avocate, et Bastienne Joerchel, politologue, pour leur engagement et pour l’opportunité d’avoir collaboré ensemble sur la Marche Bleue.

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